RÉSUMÉ
En dehors de la maladie thromboembolique veineuse classique, la recherche d’une thrombophilie est discutée dans d’autres circonstances plus rares, qu’il s’agisse de thromboses atypiques, veineuses ou artérielles, ou de patients particuliers comme l’enfant, ou la femme qui, quel que soit son âge, est exposée à des événements, grossesse ou traitements hormonaux, qui modifient son équilibre hémostatique et majorent souvent le risque de thrombose. Ce texte présente donc 32 propositions ayant obtenu pour la plupart un accord professionnel fort après de nombreux échanges. Pour les thromboses veineuses splanchniques, la recherche d’une thrombophilie classique est nécessaire, avec en plus la détection de la mutation JAK2 V617F, et dans certains cas les mutations de CALR et d’un clone HPN. En cas de thrombose veineuse cérébrale, seul le bilan de thrombophilie constitutionnel avec la recherche d’anticorps antiphospholipides est indiqué systématiquement. Pour les autres thromboses ou occlusions veineuses atypiques (ovarienne, rétinienne ou du membre supérieur), une thrombophilie ne doit pas être systématiquement recherchée sauf en cas de TVP du membre supérieur non provoquée (pas de cause locale) ou survenue chez une femme en âge de procréer. En cas de thromboses artérielles inexpliquées, seuls des anticorps antiphospholipides doivent être recherchés. De même, il est proposé de ne pas effectuer un bilan de thrombophilie chez un receveur ou donneur d’une greffe rénale, et chez un receveur d’une greffe hépatique. Chez la femme : 1) avant une contraception, une assistance médicale à la procréation ou une grossesse, il est proposé en cas d’histoire familiale documentée avec une thrombophilie connue, de rechercher chez toute femme apparentée asymptomatique le facteur biologique de risque préalablement identifié ; 2) en dehors de ce contexte, il n’est pas recommandé de prescrire systématiquement un bilan de thrombophilie avant une contraception hormonale combinée ; 3) pour une assistance médicale à la procréation (AMP), il n’est a priori pas recommandé de rechercher une thrombophilie biologique, sauf en cas d’antécédent personnel ou familial de thrombose ; 4) de même, en cas de grossesse (ou projet de grossesse), une recherche de thrombophilie n’est proposée qu’en cas d’antécédent personnel, ou familial, auquel cas seul un apparenté direct symptomatique sera exploré en priorité ; 5) en cas de pertes foetales ou de pathologies vasculaires de la grossesse, seule la recherche d’anticorps antiphospholipides est nécessaire ; 6) avant un traitement hormonal adjuvant pour un cancer du sein, il est proposé de ne rechercher une thrombophilie qu’en cas d’antécédent personnel ou familial de MTEV. Chez l’enfant : 1) il est proposé de réaliser un bilan de thrombophilie constitutionnelle en cas de purpura fulminans néonatal, ou de thrombose sévère et/ou étendue, en l’absence de situation clinique favorisante, ou d’AVC ischémique en l’absence de pathologie sous-jacente. Il importe de tenir compte de l’âge pour l’interprétation des taux d’antithrombine, de protéine C, et de protéine S, et de renouveler si besoin les dosages à distance. Doser la Lp(a) et l’homocystéine ne doit pas être systématique ; 2) un bilan de thrombophilie n’est pas recommandé avant un traitement par la L-asparaginase chez l’enfant ou après un AVCi artériel chez le nouveau-né, en dehors d’une recherche d’anticorps antiphospholipides en cas d’antécédents maternels évoquant un SAPL.
MOTS CLÉS
contraception, enfant, greffe, grossesse, nouveau-né, thrombophilie, thrombose artérielle, thrombose splanchnique, thrombose veineuse cérébrale, traitement hormonal
ABSTRACT
Apart from classic venous thromboembolic disease, the search for thrombophilia is discussed in other rarer circumstances, whether they be atypical venous or arterial thrombosis, or particular patients such as children or women, who, whatever their age, are exposed to events, pregnancy or hormonal treatments, which modify their haemostatic balance and often increase the risk of thrombosis. This article therefore presents 32 proposals, most of which have obtained strong professional agreement after numerous exchanges. For splanchnic venous thrombosis, the search for classic thrombophilia is necessary, with the addition of the detection of the JAK2 V617F mutation, and in certain cases the mutations of CALR and an HPN clone. In the case of cerebral venous thrombosis, a constitutional thrombophilia evaluation and a search for antiphospholipid antibodies is indicated, without further systematic analysis. For other atypical thromboses or venous occlusions (ovarian, retinal or upper limb), thrombophilia should not be systematically sought except in the case of unprovoked DVT of the upper limb (no local cause) or occurring in a woman of childbearing age. In cases of unexplained arterial thrombosis, only antiphospholipid antibodies should be sought. Similarly, it is suggested that a thrombophilia test should not be performed in a renal transplant recipient or donor, and in a liver transplant recipient. In women: 1. Before contraception, medically assisted reproduction or pregnancy, it is suggested that, in the case of a documented family history with known thrombophilia, any asymptomatic female relative should be screened for the previously identified biological risk factor. 2. However, outside this context, it is not recommended to systematically prescribe a thrombophilia test before combined hormonal contraception. 3. For medically assisted reproduction, it is initially not recommended to look for biological thrombophilia, except in the case of a personal or family history of thrombosis. 4. Similarly, in the case of pregnancy (or planned pregnancy), a search for thrombophilia is only proposed in the case of a personal or family history, in which case only a symptomatic direct relative will be investigated as a priority. 5. In the case of fetal loss or vascular pathology in pregnancy, only the search for antiphospholipid antibodies is necessary. 6. Before adjuvant hormonal treatment for breast cancer, it is only suggested that thrombophilia be investigated if there is a personal or family history of VTE. In children: 1. it is suggested that a constitutional thrombophilia screening be performed in cases of neonatal purpura fulminans, or severe and/or extensive thrombosis, in the absence of a favourable clinical situation, or ischaemic stroke in the absence of an underlying pathology. It is important to take age into account when interpreting antithrombin, protein C, and protein S levels, and to repeat the assays at a later date if necessary. Lpa and homocysteine should not be measured routinely. 2. Thrombophilia testing is not recommended before treatment with L-asparaginase in children or after arterial stroke in newborns, apart from testing for antiphospholipid antibodies if there is a maternal history suggestive of APS.
KEYWORDS
arterial thrombosis, cerebral venous thrombosis, child, contraception, hormone treatment, newborn, pregnancy, splanchnic thrombosis, thrombophilia, transplantation