Anticoagulants oraux directs : un défi pour l’évaluation hépatologique des patients atteints de cirrhose ?

L’utilisation des anticoagulants oraux directs (AOD) est de plus en plus répandue, y compris chez les patients atteints de cirrhose. Ces traitements perturbent les examens d’hémostase, modifiant les scores MELD et de
Child-Pugh, essentiels pour évaluer la gravité de la maladie et hiérarchiser les patients sur liste d’attente de
transplantation hépatique. Nous avons examiné l’impact de la supplémentation in vitro en rivaroxaban (300 ng/mL) et en apixaban (150 ng/mL) sur ces scores. Trente-cinq échantillons de plasmas de patients atteints de cirrhose (TP : 13-104 %) ont été analysés. L’INR (International Normalized Ratio) et le TP (temps de prothrombine) ont été mesurés avant et après supplémentation, puis après neutralisation des AOD par du charbon (DOAC-StopTM). La supplémentation en AOD a entraîné une augmentation médiane de l’INR (rivaroxaban : x2,78 ; apixaban : x1,45), entraînant une surestimation médiane du score MELD de 11,5 et 4 points respectivement. Le TP a été sous-estimé (rivaroxaban : -70 % ; apixaban : -48 %), affectant le score de Child-Pugh pour certains patients. La neutralisation des AOD par le charbon a permis de restaurer des valeurs d’INR et de TP comparables à celles mesurées avant supplémentation. Ces résultats montrent l’importance d’identifier les patients sous AOD et d’utiliser des techniques de neutralisation pour éviter une surestimation de la gravité de la maladie, susceptible de mener à des erreurs dans la gestion clinique et la priorisation sur liste de transplantation hépatique.